Noureddine Benchekroun/Bureau de Marrakech
J’ai pris ma plume et je l’ai trempée,
dans mon encrier plein à craquer.
L’encre s’écoula sur ses bords,
comme des larmes qui accompagnent un mort.
Des gouttelettes dissipées gratuitement,
beaucoup de savoir perdu définitivement.
Chacune était porteuse d’un code,
déchiffrable selon un seul mode.
Seule ma plume était capable de les situer,
une faculté qui lui a été attribuée.
Grâce à son sérieux et à sa sérénité,
elle a toujours transcrit la vérité.
Par la suite je n’étais là que pour exécuter,
les ordres de ma plume sans penser à discuter.
Avec le temps, j’ai pensé me révolter,
contre cette situation inadaptée.
Toujours soumis et esclavé,
ma mémoire était presque lavée.
Ma plume refusait de me confier les tâches,
elle avait horreur d’engendrer des casses.
Je fais partie de cette race douteuse,
irresponsable, loin d’être rigoureuse.
A notre époque les humains parlent un seul langage,
c’est l’argent qui compte et qui te rend sage.
Ça s’empire et ça devient affreux,
seul l’intérêt prime et compte pour eux.
La transcription demande intégrité,
elle me manque en plus de la fidélité.
Mon encrier est une grande niche,
du savoir, et demeure assez riche.
C’est un profond puits intarissable,
une réserve de mots inépuisable.
Ma plume n’extrait que ses besoins,
et gère le stock avec meilleur soin.
Elle puise les gouttelettes avec délicatesse,
et les entourent avec grande tendresse.
Chacune est déchiffrée sans erreur,
ma plume transcrit son âme sœur.
Moi je n’ai qu’à la tenir délicatement,
elle n’aime pas rater la ligne maladroitement.
J’ai résisté pour ne pas craquer,
lâcher tout et être détraqué.
En lisant le texte j’étais étonné,
il s’adressa à mon Âme bien raisonnée.
Un grand message pour l’humanité,
qui manque de sérieux et de sincérité.
Ma plume m’ordonna de la lâcher,
retourner à la raison sans mots mâchés.
Dans mon coin, je suis resté coincé,
me demandant pourquoi j’étais le seul blâmé.
Le 26/09/2023
